COURS DE DROIT CONSTITUTIONNEL GÉNÉRAL


Cours écrit par O. CAMY
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Sommaire du cours sur la Ve République

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Sources : P. Avril, J. Gicquel, Droit parlementaire, Montchrestien - J. Gicquel, Droit constitutionnel et institutions politiques, Montchrestien - J. Mekhantar, Droit politique et constitutionnel, Eska

Actualité : élections sénatoriales septembre 2008 :

Pour favorables qu'elles soient à la gauche, ces sénatoriales ne remettent pas en cause l'actuelle majorité. Le prochain président du Sénat, dont l'élection aura lieu le 1er octobre, sera issu des rangs de l'UMP. Avant ce renouvellement, le Sénat comptait 331 membres, ce qui mettait la majorité absolue à 166. La droite l'atteignait facilement, avec 159 UMP, la plus grande partie des 31 sénateurs de l'Union centriste, 9 sénateurs radicaux valoisiens et la quasi-totalité des 8 non-inscrits. Le nombre de sénateurs ayant été porté à 343 lors de ce renouvellement, la majorité absolue s'établira à 172. Même en perdant une dizaine de sièges, l'UMP et ses alliés y parviendront sans difficulté..
 



 

§2 le Législatif
A Statut du Parlement
 

a) recrutement des parlementaires
b) protection des parlementaires

c) réunions du Parlement

d) organisation interne

a) recrutement des parlementaires
1 Assemblée Nationale

Les députés sont élus au suffrage universel direct pour 5 ans au scrutin majoritaire uninominal à 2 tours ; l'Assemblée Nationale se renouvelle intégralement. Le nombre de députés fixé primitivement à 546 n'a fait qu'augmenter pour atteindre 577 depuis la loi du 11 juillet 1986 ; cela sans doute parce que ce sont les parlementaires eux mêmes qui décident de leur nombre... On a aujourd'hui 1 député pour 108000 habitants en moyenne.


2 Sénat

Les sénateurs sont élus au suffrage universel indirect pour 6 ans selon un mode de scrutin mixte ; le Sénat se renouvelle par moitié tous les trois ans. Il compte 331 membres (loi organique du 7 juillet 2003 + dossier).

Qui élit les sénateurs ? En premier lieu et de plein droit, les députés, les conseillers généraux et régionaux. Mais ils ne constituent qu'une petite fraction du collège électoral. En effet, la grande majorité des électeurs sénatoriaux est faite des délégués des conseils municipaux. Si le nombre des sénateurs est fonction du nombre des habitants par départements, le nombre des électeurs est quant à lui fonction de la population des communes.

Les sénateurs sont élus au scrutin majoritaire à deux tours dans les 70 départements (de métropole et d'outre-mer), en Nouvelle-Calédonie et dans les 6 collectivités d'outre-mer (Polynésie française, Wallis-et-Futuna, Mayotte, Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Barthélemy et Saint-Martin) où sont élus au plus trois sénateurs, et à la représentation proportionelle dans les 30 départements (de métropole et d'outre-mer) où sont élus 4 sénateurs et plus.

La "Haute assemblée" est composée de 331 sénateurs. (voir site web du sénat)
Le dernier renouvellement a eu lieu le dimanche 21 septembre 2008.
La loi organique n° 2003-696 du 30 juillet 2003 ( JO n° 175 du 31 Juillet 2003) a réduit la durée du mandat des sénateurs et a réformé la composition du Sénat afin de mieux représenter la réalité démographique et les collectivités territoriales.
En 2007, la loi n° 2007-224 du 21 février 2007 (JO n° 45 du 22 février 2007) a créé deux nouvelles collectivités d'outre-mer (COM), les îles de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin, désormais indépendantes de la Guadeloupe. (lire le dossier)
Pour tenir compte de ces modifications, la loi organique n° 2007-223 du 21 février 2007 (JO n° 45 du 22 février 2007) a créé deux sièges de sénateurs (à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin). La réforme de 2003 (complétée par celle de 2007) a prévu un accroissement graduel de l’effectif sénatorial, qui est passé de 321 avant la réforme de 2003 à :
* 331 sièges au renouvellement 2004
* 343 sièges au renouvellement 2008
* 348 sièges au renouvellement 2011.
Les élections devaient initialement se tenir en 2007 et 2010, mais en raison de la modification du calendrier électoral des élections municipales et cantonales (lire le dossier) et afin que les sénateurs soient élus désormais et dans les années à venir par des grands électeurs en début de mandat, les élections sénatoriales ont été décalées d'une année soit septembre 2008, 2011 et 2014.
Il sera procédé pour la première fois à l'élection des sénateurs de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin en septembre 2008.
En 2011, le Sénat sera composé de 348 sénateurs :
* 326 seront élus dans les départements de métropole et d'outre-mer
* 2 en Polynésie française
* 1 dans les iles Wallis et Futuna
* 1 à Saint-Barthélemy
* 1 à Saint-Martin
* 2 en Nouvelle Calédonie
* 2 à Mayotte
* 1 à Saint-Pierre-et-Miquelon
* 12 représentent les Français de l'étranger

b) La protection des parlementaires
La situation des parlementaires se caractérise au point de vue juridique par un certain nombre d'avantages et de contraintes dont l'objet est de garantir leur liberté dans l'exercice de leur mandat. Il s'agit de les protéger contre toute pression qui pourrait compromettre leur indépendance. Outre l'absence de procédure de révocation par les électeurs et le parti (art. 27), existent d'autres procédures :

1. incompatibilités
Certaines occupations à titre privé ou public sont dites incompatibles avec l'exercice du mandat parlementaire (c'est-à-dire ne peuvent être cumulées avec lui). Une incompatibilité contrairement à une inéligibilité n'empêche pas un candidat d'être élu ; elle l'oblige seulement à opter entre l'occupation incompatible et le mandat parlementaire.

1.1 CHAMP D'APPLICATION

1.11. Les fonctions publiques électives, en principe ne sont pas incompatibles les unes avec les autres. On peut être à la fois député et maire, sénateur et conseiller général. Toutefois, certaines lois sont venues limiter le cumul de fonction électives. Ce cumul a plusieurs inconvénients bien connus :
- la concentration du pouvoir dont bénéficient les cumulants rend inopérant les mécanismes normaux d'équilibre et de contrôle au sein des institutions administratives. Que signifie la séparation des pouvoirs lorsque les parlementaires siègent en même temps dans l'exécutif de puissantes collectivités, villes, départements, régions?

- les parlementaires cumulants sont amenés à faire des arbitrages dans la gestion de leur agenda, dans les intérêts contradictoires entre intérêts nationaux et intérêts locaux.

- la pratique du cumul favorise l'absentéisme à l'Assemblée Nationale

Voilà pourquoi certaines lois organiques sont intervenues pour limiter le cumul des mandats. La dernière, voulue par L. Fabius en 1985 restreint le cumul du mandat national et des mandats locaux. Désormais un parlementaire ne peut cumuler plus d'un des mandats suivants :
- représentant au Parlement européen

- conseiller général, régional, de Paris

- maire d'une commune de plus de 20000 habitants autre que Paris

- adjoint au maire d'une commune de 100000 habitants ou plus, autre que Paris.

Mais, ce texte a vite trouvé ses limites. D'une part, il n'a concerné au moment de son application qu'une cinquantaine de parlementaires. D'autre part, il a facilité en pratique le cumul par procuration. Par exemple un candidat célèbre accepte le temps d'une élection d'être en tête d'une liste municipale ou régionale pour augmenter le score de cette liste, puis abandonne après l'élection surtout si cette liste n'a pas obtenu la majorité. D'autres font élire leurs collaborateurs, parents ou épouse.

1.12.  Les fonctions publiques non électives sont incompatibles avec le mandat législatif. L'exception traditionnelle qui permettait la compatibilité entre la fonction de ministre et celle de parlementaire afin de faciliter la collaboration entre Exécutif et Législatif a disparu sous la Vème République. (Cf art. 23 déjà étudié). Une autre exception mineure persiste concernant les professeurs dans l'enseignement supérieur car ces derniers bénéficient de garanties statutaires assurant leur indépendance.
Nota: l'exercice de fonctions non électives conférées par un État étranger ou une organisation internationale est incompatible avec les fonctions de député ou de sénateur.

1.13. Les fonctions privées sont en principe compatibles avec le mandat parlementaire. Cela évite une professionnalisation des parlementaires. Cependant, les exceptions se sont multipliées. Ce qui se justifie du fait qu'il y a une certaine anomalie à ne pas voir de différence sinon de hiatus entre une activité parlementaire dominée par le souci de l'intérêt général et une activité privée dominée par la recherche du plus grand profit.
Une loi organique du 24 janvier 1972 a dressé une liste d'activités privées incompatibles avec le mandat parlementaire :

- fonctions de direction exercées dans des entreprises qui 1° reçoivent une aide financière d'une collectivité publique, 2° ont un objet exclusivement financier ou faisant appel publiquement à l'épargne, 3° ayant pour principale activité l'exécution de travaux ou de prestations pour le compte d'une collectivité publique, 4° dont plus de la moitié du K est constituée par des participations à des entreprises publiques

- fonctions permanentes de conseil ou de membre du conseil d'administration ou de surveillance d'entreprise publiques

1.2. SANCTIONS.  Trois cas :
1 si le parlementaire se trouve lors de son élection dans un cas d'incompatibilité, alors il a un délai de 2 mois (depuis la loi organique du 19/01/95) pour opter entre son mandat de parlementaire et la fonction incompatible. Dans ce délai, il doit déclarer au bureau de son assemblée toute activité professionnelle qu'il désire conserver. Ce bureau examine s'il y a bien incompatibilité. S'il estime qu'il y a un doute ou s'il n'est pas d'accord avec l'intéressé, alors le Conseil constitutionnel est saisi par le président de l'assemblée concernée, voire par le Garde des Sceaux ou le parlementaire lui-même. Le Conseil examine le cas. Dans les 15 jours qui suivent la décision, le parlementaire doit régulariser sa situation, sinon, il est déclaré démissionnaire d'office.

2 si le parlementaire transgresse les interdictions sus-décrites concernant une fonction publique élective ou une activité professionnelle privée, alors il est déclaré démissionnaire d'office, sans délai, par le Conseil constitutionnel à la requête du bureau de son assemblée ou du Garde des Sceaux. S'il a accepté une fonction publique nominative comme celle de membre du Gouvernement ou du Conseil constitutionnel, alors il est censé avoir opté pour cette fonction au détriment de son occupation de parlementaire sauf s'il a exprimé une opinion contraire dans un court délai.

3 si en cours de mandat, la parlementaire a un doute, alors il doit déclarer au Bureau l'activité nouvelle qu'il envisage d'exercer. A partir de ce moment, on suit la même procédure que dans le cas n°1.

2 les immunités (art. 26)
Les immunités ont pour but de protéger les parlementaires contre toute menace ou mesures d'intimidation venant de la part du pouvoir politique ou de pouvoirs privés. Elles garantissent l'indépendance de l'élu qui pourra exercer son mandat sans craindre par exemple une arrestation arbitraire ou une tentative de corruption. Sous l'appellation d'immunités, on range traditionnellement :

2.1. L'irresponsabilité (art. 26 al.1)
C'est une immunité fonctionnelle qui concerne les actes du parlementaire accomplis dans le cadre de son mandat. Ses règles sont énoncées par l'art. 26 al.1: "aucun membre du Parlement ne peut être poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé à l'occasion des opinions ou des votes émis par lui dans l'exercice de ses fonctions".

Il s'agit d'une protection permanente (qui s'étend au delà de la cessation du mandat) et absolue (couvrant tous les actes accomplis dans l'exercice du mandat parlementaire). L'idée est que ce n'est pas le parlementaire qui est protégé mais sa fonction. Sont couverts grâce à une interprétation stricte de la jurisprudence à la fois les votes, opinions, propositions et rapports du parlementaire, que l'activité ait pour cadre la séance publique ou une commission.

Il va de soi que l'irresponsabilité ne soustrait pas le parlementaire à la discipline de son assemblée (voire à des poursuites diciplinaires s'il est aussi agent public cf. affaire Stehlin 1975) et que les actes accomplis par lui en tant que personne privée relèvent du droit commun.

2.2. L'inviolabilité (art. 26 al. 2, 3, 4)
Il s'agit d'une immunité de procédure garantissant le parlementaire contre des poursuites abusives ou vexatoires relativement à des faits étrangers à ceux concernant l'exercice de ses fonctions.

On veut éviter que le parlementaire considéré comme une personne privée soit l'objet d'intimidations ou d'arrestations injustifiées. Dans ce but, on se contente de retarder le moment de la poursuite ou de l'arrestation en plaçant le parlementaire sous la protection de son assemblée. Cette dernière se prononcera sur la levée de l'immunité parlementaire qui lui est présentée au travers une proposition de résolution. Il appartiendra à une commission puis à l'Assemblée elle-même de vérifier le caractère sérieux, loyal et sincère de la demande de levée d'immunité. Il ne s'agit donc pas de soustraire un parlementaire à la justice mais d'éviter une poursuite  ou arrestation arbitraire.

Il faut noter que hors session, la protection est moindre : en effet, la poursuite est libre et l'arrestation est subordonnée non pas à l'autorisation de l'assemblée mais du Bureau.  Enfin, que ce soit en période de session ou d'intersession, poursuite et arrestation sont libres en cas de flagrant délit.

Réforme d'août 1995 : le passage à une session unique de 9 mois au lieu des deux sessions de 3 mois a conduit le gouvernement de l'époque à faire réviser  l'article 26 car cela aboutissait selon lui à prolonger le régime dérogatoire de 3 mois suplémentaires.

Le nouvel article 26 supprime l'autorisation de l'ensemble de l'assemblée  pour engager des poursuites contre un parlementaire. Cette autorisation n'est plus requise qu'en cas d'arrestation ou de mesures de contrôle judiciaire ; elle est donnée maintenant par le  seul Bureau pendant ou hors la session. Mais l'assemblée obtient la possibilité de suspendre pendant la session des poursuites, une détention ou la des mesures de contrôle judiciaire  si elle les juge abusives... Au total la protection des parlementaires est moindre et on se rapproche du droit commun... Le gouvernement semble-t-il  a été sensible au fait que "nos concitoyens ont le sentiment que la loi n'est pas la même pour tous" (J. Toubon Le Monde du 31  juillet 1995).

3 l'indemnité
Il s'agit de mettre l'élu à l'abri du besoin ... et des tentations. L'indemnité comprend l'indemnité principale (31000F brut en 1994) et une indemnité de fonction (1/4 de l'indemnité principale). Depuis 1992, le parlementaire est imposé sur la totalité.


 

 

c) Les réunions du Parlement :
C'est la monarchie parlementaire qui en France a introduit pour la première fois le principe des sessions parlementaires. Auparavant, sous la révolution, le Parlement pouvait siéger en permanence. Il décidait librement du moment où il exerçait ses fonctions. Il en résultait deux inconvénients :

- une qualité du travail législatif qui allait décroissant au fur et à mesure de l'avancement de l'année

- une mise sous pression du Gouvernement qui était sans cesse contrôlé.

La loi constitutionnelle du 3 juin 1875 évita la permanence et instaura une session ordinaire unique d'au moins 5 mois  commençant à partir du second mardi de janvier.

La Constitution de 1946 revint, elle, à la permanence. Son article 9 ne parle que d'une session annuelle. L'exécutif n'a aucune action sur les réunions du Parlement. Les inconvénients de la permanence se firent à nouveau sentir et la révision constitutionnelle de 1954  rétablissa en conséquence les sessions. Lorsque la session ordinaire avait duré sept mois au moins, le Président du Conseil pouvait en prononcer la clôture par décret pris en Conseil des Ministres.

Le général De Gaulle dans un souci de rupture avec la IVe République préféra établir des sessions courtes prévues à l'article 28 réformé récemment. Selon la version primitive de cet article, le Parlement se réunissait de plein droit lors de deux sessions ordinaires par an. La première dite session d'automne commençait le 2 octobre et sa durée était de 80 jours; elle était consacrée principalement au vote et à l'examen de la loi de finances. La deuxième appelée session de printemps débutait le 2 avril et était close 90 jours plus tard. Cela faisait un total de 170 jours qui a rapidement été  dénoncé comme insuffisant. Il est vrai que la deuxième session s'achevait souvent dans la précipitation en raison principalement du fait que le Gouvernement surchargeait l'ordre du jour en déposant tardivement ses projets de lois.

Voilà pourquoi la Commission Vedel chargée par le Président de proposer une réforme de la Constitution a, en 1993, proposé afin de mieux équilibrer le volume des sessions parlementaires de créer une session unique d'octobre à juin (9 mois). Cette réforme a été adoptée par le Congrès en Août 1995.

Les articles 29 et 30 de la Constitution de 1958 prévoient également des sessions extraordinaires qui peuvent être demandées par le Premier ministre ou la majorité des membres composant l'Assemblée Nationale. Des précautions ont été prises pour qu'elles ne durent pas trop longtemps. Elles se tiennent sur un ordre du jour déterminé et, si elles ont lieu à la demande de l'Assemblée, le décret de clôture intervient dès que le Parlement a épuisé l'ordre du jour pour lequel il a été convoqué et au plus tard 12 jours à compter de sa réunion. Le président de la République ouvre et clôt les sessions extraordinaires par décret. Il résulte à la fois des termes de la Constitution, des travaux préparatoires et de la tradition parlementaire que le Président n'a pas ici de pouvoir discrétionnaire: il doit signer le décret d'ouverture d'une session extraordinaire si on lui en fait la proposition.
Il reste que le Président Mitterrand comme nous avons eu déjà l'occasion de le préciser s'est autorisé durant la première cohabitation, en 1987, à refuser de convoquer une session extraordinaire. Il a imité en cela le général De Gaulle qui en 1960 avait déjà opposé un tel refus cette fois ci à l'Assemblée Nationale. Tout cela repose sur une interprétation contestable de l'article 29 selon laquelle les compétences de décider la convocation d'une session extraordinaire et d'en fixer l'ordre du jour "relèvent de la seule responsabilité et de la seule appréciation du président de la République" (M. Mitterrand le 16 décembre 1987). Or l'article 29 ne cite même pas le chef de l'État et l'article 19 ne fait pas du décret de convocation un pouvoir propre. La seule solution est d'admettre que le président en refusant de convoquer une session extraordinaire joue en fait son rôle de gardien de la Constitution.

Enfin, il nous faut mentionner que le Parlement peut être amené à se réunir de plein droit au vu de certaines circonstances. 5 cas :
- après une dissolution, le second jeudi qui suit son élection

- après des élections législatives si ces élections ont lieu en dehors des périodes prévues pour les sessions extraordinaires.

- lorsque le Président de la République décide d'appliquer l'article 16. Dans ce cas, l'Assemblée Nationale  ne saurait être dissoute.

- en cas de message présidentiel adressé aux Chambres, hors session, le Parlement est convoqué spécialement à cet effet. (art. 18)

- la clôture de la session ordinaire ou des sessions extraordinaires est retardée pour permettre, le cas échéant l'application de l'article 49. A cette fin des sessions supplémentaires sont de droit.


 

d) L'organisation interne du Parlement
Les Chambres sont des assemblées nombreuses qui ne peuvent faire œuvre utile qu'en se soumettant à une discipline rigoureuse et en organisant méthodiquement leur tâche. Voilà pourquoi la Vème république a rompu avec la tradition de souveraine maîtrise qu'ont les assemblées sur leurs condition de travail. Ce qui a pour conséquence  :

- les chambres ne peuvent plus établir leur règlement intérieur librement. Toute une série de matières sont aujourd'hui organisées par la Constitution elle-même et non par leur règlement. Ce règlement est contrôlé obligatoirement par le Conseil constitutionnel avant sa mise en application.

- le statut des organes de travail des assemblées a été soigneusement précisé. Quels sont-ils?

1 le Bureau
C'est une autorité collective, élue par l'assemblée et chargée de la direction des travaux parlementaires et de l'organisation matérielle des services de la Chambre. Les fonctions et l'organisation du bureau sont sensiblement les mêmes au Sénat et à l'Assemblée Nationale. Prenons l'exemple de celui de l'Assemblée nationale.

La Constitution de 1946 lui attribuait un rôle politique en le chargeant notamment de contrôler l'action du Gouvernement lorsque la Chambre était en vacances. Les constituants de 1958 n'ont pas voulu étendre ses compétences au delà de ses fonctions techniques.

Composition et rôle  de ses membres :
* le Président de l'Assemblée Nationale : l'importance politique du président a subi la même réduction que celle des Chambres. Sous la IVème République, il était appelé à remplacer le Président du Conseil en cas de dissolution et il assurait l'intérim des fonctions du Président de la République. La Constitution de 1958 lui a retiré ces compétences politiques mais a renforcé son autorité de technicien de la séance parlementaire.

Le président assure la permanence de sa fonction en étant élu pour la durée de la législature (l'élection a lieu à trois tours, la majorité absolue étant requise aux deux premiers tours). Son rôle de directeur des débats s'est accru. Il fixe l'ordre dans lequel les députés inscrits pour intervenir prendront la parole ; il est également habilité à inviter un député à conclure son intervention lorsqu'il juge que l'Assemblée est suffisamment informée. Par souci d'impartialité, le président s'abstient généralement de participer aux débats et aux scrutins. Il ne fait partie d'aucune commission parlementaire. Précisons enfin que d'un point de vue constitutionnel, le président de l'Assemblée Nationale comme celui du Sénat lisent les messages du Chef de l'État (art 18), émettent un avis lors du recours à la dissolution (art12) ou aux pouvoirs de crise (art16). Enfin, ils peuvent soumettre au Conseil constitutionnel une loi ou un traité qu'ils estiment contraires à la Constitution (art 54 et 61). Ils nomment chacun 3 des membres de ce même Conseil.

* les autres membres du Bureau : il s'agit de 6 vice présidents, 3 questeurs et 12 Secrétaires pour l'Assemblée Nationale. Ils sont élus au début de chaque législature et renouvelés chaque année, à la séance d'ouverture de la première session ordinaire. L'élection a lieu au scrutin majoritaire uninominal en s'efforçant de reproduire au sein du Bureau la configuration politique de l'Assemblée. Pratiquement, une entente entre les groupes répartit les différents sièges.

Le Bureau est une autorité collégiale qui, outre ses attributions administratives relatives au fonctionnement matériel de la Chambre exerce certaines compétences politiques: c'est lui notamment qui décide de la recevabilité des propositions de résolution portant mise en accusation devant la Haute Cour de Justice. C'est lui également qui apprécie la recevabilité financière des propositions de loi et des amendements.

2 La Conférence des Présidents
Instituée en 1911 à la Chambre des Députés et en 1947 au Luxembourg, cet organe s'occupe avant tout des rapports avec le Gouvernement. La Conférence est composée pour chaque Chambre du Président de l'Assemblée, des vice-présidents, des présidents des commissions permanentes et des commissions spécialisées intéressés, des présidents des groupes parlementaires  ainsi que du rapporteur de la commission des finances. Le Gouvernement y est représenté par un de ses membres.

C'est elle qui établit  l'ordre du jour (qui est le calendrier de travail de chaque Chambre). Autrefois, elle l'établissait souverainement. Sous la Vème République, le Gouvernement peut se prévaloir d'une priorité (art48). Mais en pratique, il y a toujours négociation entre les groupes de la majorité.

3 Les Groupes
A la Chambre des Députés de la IIIème République, il existait de nombreux organismes qui, sous le nom de "groupes de défense" réunissait les députés pour la défense d'intérêts locaux ou professionnels. Ces groupes mettaient en danger le caractère représentatif des mandats des députés. Ils furent interdits par le règlement de l'Assemblée Nationale de la IVème République mais se reconstituèrent. Le règlement actuel les interdit aussi.

Échappent à cette condamnation les groupes parlementaires constitués pour l'étude d'un problème déterminé.

Ils sont formés de la réunion des parlementaires professant les mêmes opinions politiques de telle sorte qu'ils constituent approximativement la représentation des partis. Approximativement car si le groupe communiste ou socialiste sont étroitement rattachés à leurs partis respectifs, eu centre et à droite les liens sont plus lâches.

La formation des groupes n'est pas libre. Pour éviter leur pullulement, le règlement de l'Assemblée Nationale exige qu'ils comptent au moins 20 membres (30 avant une résolution de1988 qui a permis au parti communiste de conserver un groupe), apparentés non compris. Les apparentés sont des parlementaires qui, n'étant pas membres du parti qui représente le groupe s'associent à lui sur un plan administratif.

4 Les commissions

4.1 Les commissions spéciales: il s'agit de commissions temporaires dont la durée de vie dépend de la durée du processus de décision relative au texte de loi qu a motivé leur création. Leur composition reflète celle des Assemblées. Elle se fait au prorata des groupes parlementaires. L'article 43 de la Constitution prévoit que l'examen d'un texte de loi est confié à "des commissions spécialement désignées à cet effet" à la demande du Gouvernement ou d'une Assemblée. Si cette demande n'est pas intervenue, le texte est envoyé à une commission permanente.
En pratique, le recours à ces commissions a été rapidement abandonné et on est revenu à la tradition qui veut qu'un projet ou une proposition de loi sont envoyés à une commission permanente. (10 seulement de 1981 à 1993).

4.2 Les commissions permanentes: sous les précédentes Républiques ces commissions étaient sorties de leur rôle de préparation du travail en vue de la séance publique; elles étaient devenues des moyens de contrôle du Gouvernement aux mains des partis politiques. De plus, ce contrôle était facilité car il y avait autant de commissions permanentes que de ministères...
Un réaction s'est produite en 1958.  Deux conséquences :

- diminution de leur nombre : on est passé par exemple à 6 Commissions permanentes à l'Assemblée Nationale (contre 19 sous la IVe République). Il n'y a donc plus de correspondance entre ministères et commissions permanentes.

- diminution de leurs prérogatives : sous les précédentes Républiques, la discussion en séance publique s'engageait sur la rédaction du projet ou de la proposition adoptée par la commission ; Aujourd'hui, le débat s'engage sur le texte présenté par le Gouvernement (sauf s'il s'agit d'une proposition de loi).

4.3. Les commissions d'enquête ou de contrôle: (cf la fonction de contrôle du parlement)
4.4. Les délégations parlementaires